Zadiga-Cité : le garage réinventé en laboratoire urbain

Sur la presqu'île lyonnaise, au cœur du quartier de Confluence, une ancienne halle de garage a repris vie sous l'impulsion de l'Atelier Thierry Roche & Associés. Loin des gestes architecturaux démonstratifs, le projet Zadiga-Cité incarne une philosophie discrète mais radicale : celle de la résilience urbaine. Ici, pas de tabula rasa. L'existant parle, respire, et se transforme en un espace de travail pensé comme un organisme vivant, connecté à la ville et à ses flux.

La réhabilitation d'un bâtiment industriel désaffecté en siège social et lieu collaboratif répond à une urgence contemporaine : celle de donner du sens à nos espaces de travail. Dans un territoire marqué par l'expérimentation urbaine, Zadiga-Cité devient bien plus qu'un simple bâtiment de bureaux. C'est un manifeste architectural pour une ville désirable, où performance économique rime avec sobriété énergétique et qualité relationnelle.

Une enveloppe préservée, une âme réinventée

Le bâtiment d'origine, un ancien garage du marché de gare, portait en lui l'histoire industrielle du quartier. Plutôt que de le raser pour reconstruire, l'Atelier Thierry Roche & Associés a fait le pari du réemploi intelligent. L'enveloppe existante, avec ses généreux volumes intérieurs et sa structure métallique apparente, a été conservée et magnifiée. Cette approche témoigne d'une conviction : la ville de demain se construit avec les ressources de celle d'hier.

La stratégie architecturale repose sur un équilibre subtil entre conservation et innovation. Les charpentes métalliques d'origine dialoguent avec des insertions contemporaines en bois et en béton brut. Les façades, habillées de bardage bois clair signé par le groupe Tenbo, apportent chaleur et respiration à l'ensemble. Ces menuiseries extérieures en bois créent un rythme vertical élégant, tandis que de grandes baies vitrées assurent une relation constante avec l'environnement urbain.

La verrière longitudinale au centre du dispositif apporte de la lumière naturelle. Cette solution technique simple mais efficace participe activement à la performance énergétique du bâtiment tout en créant des ambiances de travail lumineuses et agréables. Les toitures en shed, caractéristiques de l'architecture industrielle, ont été conservées et réinterprétées, créant une signature architecturale reconnaissable depuis l'espace public.

Un bâtiment à énergie positive : l'ambition du E4C2

L'objectif est clair et ambitieux : atteindre un niveau de performance BEPOS (Bâtiment à Énergie POSitive) avec une certification E4C2, soit le plus haut niveau d'exigence environnementale. Zadiga-Cité vise 80 % d'auto-consommation énergétique, un exploit rendu possible par une conception intégrée où chaque élément contribue à la sobriété du projet.

La toiture accueille des panneaux photovoltaïques qui produisent l'énergie nécessaire au fonctionnement quotidien du bâtiment. Le jeu d'inertie thermique, combiné à l'utilisation de matériaux biosourcés, permet de réguler naturellement les températures intérieures. Les équipements techniques ont été sélectionnés pour leur faible consommation énergétique, tandis que l'emploi de matériaux à faible empreinte carbone ponctue l'ensemble de la démarche.

Cette approche bas carbone ne relève pas du gadget technologique mais d'une stratégie globale pensée dès l'esquisse. Le bureau d'études OTEIS, spécialisé en fluides et énergies, a travaillé main dans la main avec les architectes pour concevoir un bâtiment intelligent, capable d'anticiper et de réguler ses besoins énergétiques en fonction des usages réels.

Des espaces pensés pour l'intelligence collective

À l'intérieur, Zadiga-Cité se révèle comme un plateau ouvert sur la créativité et la collaboration. Les volumes généreux, hérités de la structure industrielle d'origine, ont été réinterprétés pour accueillir une diversité de fonctions : bureaux, salles de réunion, salles de conférence et d'exposition, cuisine commune, espaces de co-working, salle immersive pour les présentations innovantes.

Les doubles hauteurs sous charpente apparente créent une sensation d'espace et de liberté. Des mezzanines métalliques noires structurent l'espace sans cloisonner, permettant des vues traversantes et favorisant les interactions entre les équipes. Les matériaux bruts – béton ciré au sol, métal noir pour les structures secondaires, bois naturel pour le mobilier – instaurent une atmosphère industrielle épurée mais chaleureuse.

L'aménagement intérieur joue sur les contrastes : espaces de concentration vs espaces de rencontre, alcôves intimistes vs plateaux ouverts. Cette variété spatiale répond aux nouveaux modes de travail qui exigent flexibilité et adaptabilité. Les postes de travail se nichent sous les fermes de charpente apparentes, tandis que les espaces de détente profitent de la lumière zénithale de la verrière centrale.

Les choix chromatiques participent à l'identité du lieu : tons neutres dominants ponctués par des touches de jaune moutarde, de vert canard et de noir profond. Ces accents de couleur apportent dynamisme et personnalité sans tomber dans l'excès décoratif. Le mobilier contemporain, mélange de pièces design et d'éléments sur-mesure en bois massif, crée une ambiance professionnelle mais accueillante.

Un projet collaboratif au service de l'expérimentation

Zadiga-Cité n'est pas qu'un lieu de travail : c'est un laboratoire urbain dédié à la recherche et au développement appliqués au bâtiment. Les espaces ont été conçus pour faciliter le travail collaboratif avec d'autres professionnels de la construction, accueillir de jeunes entrepreneurs, ou encore héberger des expositions et des événements liés à l'innovation architecturale.

Cette vocation expérimentale s'inscrit parfaitement dans l'ADN du quartier de Confluence, territoire d'innovation urbaine par excellence. Le projet devient ainsi un trait d'union entre recherche théorique et application pratique, entre réflexion environnementale et réalisation concrète.

L'Atelier Thierry Roche & Associés, installé dans ces nouveaux locaux, y a également établi son siège social. Ce choix témoigne d'une cohérence entre discours et pratique : l'agence occupe un bâtiment qui incarne ses propres valeurs architecturales et environnementales. La proximité avec d'autres acteurs de l'innovation urbaine crée un écosystème fertile pour l'émergence de projets collaboratifs.

Une reconnaissance saluée par les pairs

La qualité du projet n'a pas échappé aux observateurs du secteur. En 2021, Zadiga-Cité a reçu le Trophée des Bâtiments de l'Immobilier dans la catégorie Prix du Coup de Cœur du Jury. Cette distinction récompense l'approche globale du projet : sa dimension environnementale ambitieuse, sa qualité architecturale, mais aussi sa capacité à proposer un modèle innovant pour les espaces de travail contemporains.

Au-delà de cette reconnaissance, le bâtiment a également obtenu le label OSMOZ, certification qui évalue la qualité d'usage et le bien-être des occupants. Cette double labellisation confirme que performance environnementale et qualité de vie ne sont pas antagonistes mais peuvent au contraire se renforcer mutuellement.

Un modèle pour la ville désirable

Zadiga-Cité démontre qu'il est possible de concilier ambition environnementale, qualité architecturale et viabilité économique. Le projet incarne une vision optimiste de la transformation urbaine, où le réemploi du patrimoine industriel devient un levier de création plutôt qu'une contrainte.

Dans un contexte où la question de la sobriété énergétique et de l'empreinte carbone des bâtiments devient centrale, ce projet trace une voie possible : celle d'une architecture responsable qui ne renonce ni à l'esthétique, ni à la fonctionnalité, ni au plaisir d'habiter les lieux. L'inscription dans le tissu existant, le recours massif aux matériaux biosourcés, l'optimisation énergétique poussée, tous ces éléments convergent vers un même objectif : bâtir une ville plus durable sans sacrifier la qualité de vie de ceux qui l'habitent.

Le quartier de Confluence, laboratoire urbain à ciel ouvert, trouve dans Zadiga-Cité un projet emblématique de ses ambitions. Cette réhabilitation intelligente prouve que l'architecture peut être un outil de résilience urbaine, capable de répondre aux défis environnementaux tout en créant des espaces de travail inspirants et performants. Un équilibre rare, qui mérite d'être étudié et répliqué ailleurs.